Du papier à l’écran
Maruo, Mon-chan, Yukiji, Yoshitune, Kenji, Croa-Croa, Otcho, Donkey et Fukube
Des acteurs enfants épatants et… ressemblants !
C’est à l’occasion de l’ouverture de la 14ème édition de l’Etrange Festival de Strasbourg, hier au soir, que j’ai pu découvrir le premier volet de 20th Century Boys, la trilogie nippone tirée du manga fleuve homonyme d’Urasawa. L’atmosphère très particulière que l’on trouve dans un festival, et l’attrait lui aussi tout particulier qu’exerce ce manga ont sans doute influé sur l’appréciation que j’ai eu du film. Ceci dit, je ne vais certainement pas chercher à bouder mon plaisir.
L’histoire de 20th Century Boys se déroule sur au moins trois périodes différentes (fin des années 60, fin des années 90 et le XXIème siècle après « Ami ») Tout débute de nos jours avec la mise en parallèle d’une secte dominée par un gourou étrange, Ami, et la multiplication d’attentats bio-terroristes aux quatre coins du monde. Quand Kenji, homme moyen, tenancier d’une petite épicerie, découvre que la secte d’Ami reprend le signe de ralliement créé par sa bande de copains presque trente ans plus tôt, il va se retrouver embrigader dans une histoire de fin du monde et de sauvetage de l’humanité qu’il a lui-même imaginée, enfant, et consignée dans un cahier de prédictions.
La force du manga résidait dans l’imbrication étroite entre le passé, le présent, et un futur qui fait froid dans le dos. Il reprenait également certaines scories de la société japonaise (la multiplication des sectes, les attentats au gaz sarin), tout en rendant hommage à ses propres héros (les mangakas et les rockeurs) Et les personnages étaient passionnants.
L’adaptation cinématographique, qui suit les six premiers volumes du manga, a des défauts. Il y a des longueurs (notamment sur la fin) dues non pas à de mauvais choix scénaristiques (ceux-là sont une réussite complète) mais à un petit manque de rythme, associé à une utilisation de temps en temps limite de la musique. Cette dernière est d’ailleurs pour moi le seul gros défaut du film, notamment dans la multiplication de certaines scènes « pleines de sens », avec force violons et lyrisme qui tranche franchement avec les scores plus rock d’autres scènes, et nettement plus appropriés à l’histoire. On peut ajouter à cela quelques tics hérités de la culture télévisuelle japonaise (quelques scènes surjouées notamment), et des effets spéciaux un peu « cheap » (par rapport à une grosse production américaine) et de temps en temps maladroits
Ce sont les seuls défauts du film et, au regard des réussites, ils sont minimes ! Ainsi si les attentats à l’aéroport d’Haneda sentent l’incrustation informatique à plein nez, le robot de fin est quant à lui très réussi. Il suffit d’accepter les limites budgétaires du film qui, de toute façon, se concentre, comme le manga, bien plus sur ses personnages et sur l’atmosphère décalée et parano qui se développe autour d’eux. Les apparitions d’Ami font preuve à ce propos de partis-pris visuels plutôt rares dans la production nipponne actuel, sauf si l’on regarde du côté des films d’horreur. Idem pour les morts, on est loin de la production tout public auquel on aurait pu avoir droit.
De plus, les passages du présent au passé se font très naturellement, sans artificialité, et avec une simplicité de lecture agréable pour le spectateur.
Mais la grande réussite du film reste le casting. Les acteurs, enfants et adultes, ont été choisis avec soin, et non seulement sont-ils très ressemblants à leurs personnages d’origine, mais en plus, ils jouent bien (à une ou deux scènes près, mais sur plus de deux heures…) Yukiji, malgré ce qui pouvait transparaître dans les bandes-annonces, n’a rien d’une Japonaise soumise, Yoshitsune a l’air penaud du cadre moyen parfait, Mon-chan parle (presque) allemand, Otcho est vraiment classe, ils sont tous bons.
Je me demande si ce film sera autant apprécié par quelqu’un qui ne connaît pas le manga original, mais pour moi il m’a semblé bien et simplement écrit (la plus grosse gageure), et les acteurs rendent bien le côté charismatique de leurs personnages. Pour avoir testé d’autres adaptations live de manga (notamment le tristement célèbre film de Death Note), je peux affirmer que 20th Century Boys est une vraie réussite, et l’abîme est large entre ce film-là et certains autres.
Il sortira sur les écrans français en janvier 2009, vous avez deux mois pour lire le manga.